Difficile de passer à côté du buzz cinéma du moment: le film de Xavier Durringer sur l’ascension au pouvoir de l’actuel président de la république. On pouvait s’attendre au pire, un film avec un tel thème pouvant aisément tomber soit dans la critique facile et caricaturale, soit dans une ode dithyrambique visant à flatter l’égo ce celui qui en a un plus gros que sa taille. Cette docu-fiction (avec le mot fiction mis bien en avant dès le début du film, sans doute pour se couvrir) évite élégamment ces deux écueils et nous livre une fresque réaliste et objective sur un homme avide de reconnaissance et de pouvoir et prêt à tout pour les obtenir.

Beaucoup de journalistes affirmaient avec détour que Sarkozy avait « peur » de la sortie de ce film un an avant la campagne de 2012. Si c’est bel est bien le cas, je pense que cette peur était tout a fait légitime au vu de l’image du candidat Sarkozy apportée par ce film: susceptible, impulsif, au sang chaud, le Sarkozy du film n’hésite pas une seule seconde à trahir son propre camp, à manipuler l’opinion, à organiser des sorties théâtrales, à donner des ordres à la presse, et à jouer des effets d’annonce où la forme compte plus que le fond, aucune promesse n’étant formulée avec le véritable désir de la tenir. En bref, le Sarkozy du film ressemble à s’y méprendre au Sarkozy de la vraie vie tel qu’il est connu des media et des analystes politiques (et de tout internaute s’intéressant un minimum au sujet), le Sarkozy de façade ne trompant plus guère que les classes les moins cultivées ou informées de la population française (malheureusement une majorité des électeurs non-absentéistes), et de ce point de vue ce film peut en effet être « dangereux » pour le camp de Sarkozy en 2012 si ces gens encore bercés par ses belles paroles réussissent, à travers ce film, à percevoir l’envers du décor, le fameux « off » qui fait buzzer les rédactions.

Tout odieux et manipulateur soit il, ce film montre également ce qui a permit au candidat Sarkozy de devenir le président Sarkozy : son talent, principalement de gestionnaire d’image. Qu’on l’aime ou pas (fidèle lecteur, régulière lectrice, tu sais que je me case plutôt dans le camp des « pas« ), il est en tout objectivité impossible de ne pas reconnaitre son art de la guerre politique. Sarkozy est un peu le Sun Tzu de la politique française, en cela qu’il est un stratège hors pair et qu’il a redéfini les règles de la guerre, politique dans son cas. Et cela, le film le retranscrit également avec brio. Comme on peut l’entendre autour de la table des Chirac, « il a du talent, le p’tit ». Cette fidèle retranscription est d’ailleurs ce qui m’a rendu le film appréciable : tous les personnages sont traités avec la même déférence et fidélité vis à vis des personnes réelles qu’ils représentent. Je tire notamment mon chapeau aux acteurs jouant Villepin et Chirac, plus vrais que nature en numéro deux évincé par avoir trop voulu jouer avec les règles de la politique des années 90, et en chef de l’état sympathique et nature mais usé et fatigué par trop de combats politiques et une France qui ne le comprend plus, et qu’il ne comprend plus.

Un film à voir, donc, et à conseiller à votre entourage, surtout ceux qui pourraient avoir envie de voter Sarkozy en 2012, histoire de les faire réfléchir, un peu, et d’éviter de faire de notre petit président le George W. Bush français, un président qui laisserait dans l’histoire la marque des pires années et des pires décisions politiques prises de mémoire d’homme, et malgré cela réélu par un peuple qui aime tant être dans la peau du mouton.

Ma note: 7/10

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La citation du jour: « Tout va bien. Il m’a déclaré sa loyauté je ne l’ai pas cru, je lui ai souhaité bonne chance pour l’UMP et il ne m’a pas cru non plus ».
La chanson du jour: Gimme more, Britney Spears, « Gimme gimme more, gimme more, gimme gimme more, the center of attention »

Même si 2012 approche et que les candidatures crédibles&intéressantes se font toujours attendre, la vie est belle !