2017 est à nouveau une année d’élection présidentielle pour la France, et à quelques poignées de semaine de l’échéance le cirque médiatique habituel est en marche (pun intended). En revanche, cette année plus encore que précédemment, le niveau d’irréalisme et d’incompétence (au mieux), voire de corruption et de « pourritude » (au pire) (j’invente des mots si je veux) des candidats a de quoi rendre dingue toute personne s’intéressant à cette mascarade même de manière périphérique, et de décourager les quelques rares idéalistes qui « y croient encore ».

A titre personnel, si je n’ai jamais raté d’élection depuis ma majorité (exception faite des élections municipales qui, en général, ne m’intéressent ou ne m’impliquent guère), cela fait une paire d’années que j’ai virtuellement baissé les bras vis à vis du pays, de ses politiques, et surtout de son électorat. Je me suis résigné à voter systématiquement pour « le moins pire » plus que par véritable conviction ou adéquation d’un candidat à mes propres idées, certes extrêmes sur certains points (ma conception de la liberté a tendance à faire écarquiller les yeux d’une grande partie de mon entourage) et utopistes pour d’autres (ma conception de la justice et de son fonctionnement idéal donnerait sans doute des cheveux blancs à mon ami OPJ si elle était appliquée verbatim). Cette année encore, je m’apprête depuis quelques mois à offrir ma voix à un candidat « par dépit » , celui qui est le moins éloigné de mes propres idées, même s’il faut reconnaitre qu’au fil des semaines je suis plutôt agréablement surpris par ses déclarations et clarifications de feuille de route, et mon vote risque d’être moins à contre-coeur que prévu. Mais il y a en revanche deux choses qui me chiffonnent, et qui me chiffonnent GRAVE dans cette élection à venir.

La corruption ouverte et décomplexée généralisée d’une large partie des candidats. Fillon est en ligne de mire, bien évidemment (et pour un candidat qui se prétend « de droite » – HAHAHAHAHAHAH – ça devrait encore plus m’agacer, mais dès la fin de la primaire je savais déjà que j’allais militer CONTRE ce bonhomme qui, tel Sarko en son temps, présente un programme d’extrême droite pure et dure maquillé derrière une étiquette que seuls les ignares, les naifs, et les militants de l’autre bord peuvent encore décemment considérer comme un parti « de droite ». Si vous avez encore le moindre doute, mettez en parallèle le programme de Fillon 2017 et le programme de Le Pen 2002: c’est un copier-coller) mais c’est loin d’être le seul. Vous allez me dire, un politicien corrompu, c’est tellement courant que c’en est devenu normal. Mais sans tomber dans les limites extrêmes des pays nordiques où une ministre démissionne pour avoir payé une fois un taxi avec sa carte du boulot en ayant oublié la sienne, ce qui est assez effarant c’est le niveau de tolérance vis à vis de la dite corruption dans le paysage électoral français. Surtout, bien évidemment, quand elle touche le candidat de « votre » camp. Nous en sommes arrivés en France à un niveau d’hypocrisie et d’aveuglement sélectif délibéré comparable à l’électorat américain ayant porté Trump au pouvoir, capables d’affirmer à des journalistes que la photo d’une place à moitié vide est « plus remplie » que la même photo de la même place bondée de monde, juste parce qu’ils savent que la place vide correspond à un discours de « leur » candidat, et l’autre de leur adversaire. Ce sont les post-vérités informatives orwelliennes, mais provenant délibérément du peuple plutôt que du gouvernement, et c’est ça qui est terriblement inquiétant.

L’autre chose qui m’agace est le sentiment d’impuissance vis à vis de ce système lorsqu’on veut le faire évoluer dans le bon sens en jouant les règles du jeu. J’ai suivi de près les « Nuits Debout« , à l’époque, et la répression policière régalienne d’icelles. Tellement intolérable que les policiers eux mêmes ont laissé fuiter leurs consignes d’action dans la presse… mais les ont quand même appliquées. Un autre problème majeur du pays… Les seuls à vraiment croire encore dur comme fer au bien fondé des lois et de l’autorité de l’Etat sont ceux qui les font respecter, et de facto ils les font respecter même quand à titre personnel ils considèrent un ordre inacceptable ou une loi dénuée de sens. Après la dissolution lente mais prévisible du mouvement, on a vu naitre sur internet plusieurs initiatives populaires visant à s’accorder sur un « candidat alternatif » à l’élection présidentielle, sélectionné sous les mêmes principes démocratiques que les débats des Nuits Debout, et qui serait jeté aux lions de la politique de carrière pour cette élection. La plus large de cette initiative était sans doute LaPrimaire.org, dont le fonctionnement était plutôt bien organisé (programmes clairs, thématiques, etc.). Si la candidate qui est arrivée en tête des soutiens sur le site était assez loin de mon propre choix, je trouve néanmoins absolument scandaleux que – ce qui ne surprendra personne – la candidate en question n’ait pas pu réunir les 500 signatures nécessaires pour se présenter à l’élection. Alors certes, ses soutiens sur le site ne rassemblaient même pas 40 000 personnes, ce qui (en imaginant que seuls ces personnes votent pour elle le jour de l’élection si elle n’avait réussi à convaincre personne d’autre) fait un score inférieur à 0.1% quand on le rapporte aux nombre de suffrages exprimés habituellement sur une présidentielle française. Mais quand même. Cela prouve une faille idéologique énorme du principe de sélection.

Aujourd’hui le système est vicié, et l’esprit général des lois de ce type (à l’origine le principe des 500 signatures était juste pour s’assurer qu’aucun guignol n’était accepté dans une élection sérieuse… le fait que Sylvain Duriff n’ait pas les 500 signatures me choque moins), aujourd’hui c’est devenu un autre système de faveur et de familles, pour soutenir les candidats de son camp, mettre des bâtons dans les roues des autres, et surtout empêcher tout ce qui pourrait changer le status quo, aussi improbable leur victoire soit elle. C’est là le plus gros problème de la société politique française, à mes yeux. Si le principe de la séparation des pouvoirs ne fonctionne encore pas trop mal en France (disons qu’on pourrait faire mieux, mais qu’il y a nettement pire ailleurs…), le système politique est lui même victime de sa propre non-séparation de pouvoirs. Comment voulez vous restaurer la confiance du peuple en ceux qui sont censés représenter son élite et apte à les diriger quand ce sont les gens en place qui décident des règles du jeu? Comment peut-on accepter que les députés soient ceux qui décident et votent de leurs propres salaires, indemnités, retraites? Comment accepter que les gens qui tiennent les rênes du pouvoir décident eux même de ce qu’ils ont ou n’ont pas le droit de faire (genre embaucher et rémunérer des gens de leur famille à des salaires largement différents des salaires de leurs autres collaborateurs pour un travail identique sur le papier, même en accordant le bénéfice du doute sur son aspect fictif…). Comment accepter que ceux qui décident qui a et n’a pas le droit de briguer le poste de chef de l’état soient ceux dont les postes et l’avenir politique sera directement lié au bon vouloir de la personne récupérant le poste? C’est complètement aberrant, et ça ne choque (presque) personne.

Le problème, surtout pour un bisounours pacifique comme moi, c’est que ces derniers mois ont achevé de prouver ce que les plus cyniques d’entre vous avaient déjà compris depuis longtemps (oui, comme quoi, plus cynique que moi, ça existe encore): qu’il est actuellement impossible de faire évoluer ce système vicié en jouant selon les règles du jeu. Et si c’est quelque chose que j’ai du mal à reconnaitre, quand on connait mon ego démesuré: je n’ai aucune « bonne » solution à offrir, même utopique… Je vais néanmoins tenter de ne pas faire mourir la dernière petite étincelle d’espoir qu’il me reste vis à vis du pays, sauf cataclysme, il est probable que notre prochain président soit justement celui dont les idées, sans être tout à fait proches, sont en tout cas les moins éloignées des miennes sur de nombreux points… Il veut s’entourer de sang neuf et faire bouger le fonctionnement des institutions, sur le papier. Je n’y crois qu’à moitié (parce que même s’il était de bonne foi, Le Système ™ serait là tout entier à freiner des deux pieds, et en pratique le pouvoir d’un président reste très limité…) mais bon… On verra bien. Sans grande conviction…

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La citation du jour: « J’ai mal au ventre, je crois que j’ai envie de faire caca »
La chanson du jour: President Gas, The Psychedelic Furs, « President gas is president gas again! He comes in from the left sometimes, he comes in from the right… It’s so heavily advertised that he wants you and I »

Même si je finis par être aigri de tout ce cirque, la vie est belle !